| BOULEAU. Arbre des climats humides dont le bois est d'un  blanc roux. Son  écorce est d'un blanc d'argent, brillante et parfois crevassée.       Le Bouleau, arbre de futaie dont  les menus brins servent à faire des balais, est nommé bezv, ou bezven en  langue celtique, et bez en Bas-Breton. Du mot bès, Bouleau  en patois du Gévaudan, a été formée l'expression bessedo, boulaie  ou lieu planté de Bouleaux, d'où dérive le nom de la famille de Bessettes, portant six feuilles de Bouleau versées dans ses armoiries qui  ont été fondues en 1250 dans celles  des de Gayffier, du Gévaudan, appelés à relever le nom de Bessettes.       Depuis cette époque, la  famille de Gayffier blasonne : d'azur, à la muraille d'argent, mouvante de la pointe de l'écu, maçonnée de sable de six carreaux  et sommée d'un lion issant d'or ; chaque carreau chargé d'une feuille de bouleau  versée de sinople.   
      
        | 
 Gayffier de Bessettes :  D'azur, à la muraille d'argent, maçonnée de sable de six pièces, montant de la pointe, chargées chacune d'une feuille de bouleau renversée de sinople, et un lion issant d'or en chef. (Auvergne)
 |     |    Le Bouleau est aussi l'emblème  héraldique parlant des de Puel du Besset et Besset de la Valette,  respectivement en Gévaudan et en Forez.       En Allemagne, le Bouleau nommé birke, figure  dans les écus des familles Pirker de Pirk (Franconie) et Birkicht  (Misnie), comme  emblème parlant.       Cet  arbre joue un rôle essentiel dans les traditions populaires de  l'Europe centrale et du Nord. Les Grecs et les Latins l'ont peu  connu ; et si notre ancien botaniste Mattioli attribue aussi à l'eau du Bouleau des  propriétés extrêmement bienfaisantes, il me semble  fort probable qu'il a tiré ces notions de quelque livre allemand. L'utilité du  Bouleau chez les gens du Nord peut être seulement comparée à celle du palmier  chez les Indiens. Les proverbes russes recueillis par Dal nous  apprennent que le Bouleau fait bien quatre choses : il donne la lumière au  monde (avec les branches du Bouleau on fait des torches) ; il étouffe les cris (du  Bouleau on tire le goudron, et on goudronne les roues des chariots) ; il guérit les  malades (par l'eau, dont Mattioli nous apprend  les propriétés bienfaisantes ; l'eau goudronnée est encore à la mode dans la thérapeutique moderne),  et il nettoie (dans les bains russes,  pour provoquer la transpiration, on se fustige tout le corps avec des branches  de Bouleau). On dit aussi que le  Bouleau guérit des maladies de la peau, et qu'il est le puits du peuple. Avec l'écorce du Bouleau, les paysans russes  se font aussi des souliers. « Dans la petite Russie, dit Girard de Rialle, lorsque les jeunes filles vont au bois chercher des fleurs et des branches de Bouleau, elles chantent : Ne vous réjouissez pas, chênes ; ne vous  réjouissez pas, chênes verts ! Les filles ne vont pas à vous ; elles vous apportent ni pâté, ni gâteau, ni omelette ! Io, io, Semik et Troitsa !  Réjouissez-vous, Bouleaux, réjouissez-vous, verts Bouleaux ! Les filles viennent à vous ; elles vous apportent pâtés,  gâteaux et  omelettes ! ». C'est le jour de la Pentecôte que les jeunes filles  russes vont suspendre leurs couronnes aux arbres bien-aimés ;  c'est le jour de la Pentecôte que les paysans russes plantent  devant leurs isbas des branches de Bouleau, espèces de mais, symboles verdoyants de la  belle saison qui est revenue sous la chaleur bienfaisante des langues de  feu, des rayons de soleil qui viennent réveiller la terre. On a soin  parfois de mettre autour du jeune Bouleau un fil, un ruban rouge, pour  qu'il pousse mieux, pour éloigner de lui le mauvais oeil. Afanassieff nous  parle d'un Bouleau qui montre sa reconnaissance à la jeune fille  persécutée par sa marâtre sorcière, en souvenir de l'aimable attention  qu'elle a eue de lier autour de lui un ruban. Dans un autre  ouvrage, Afanassieff fait mention d'un Bouleau blanc qui pousse  dans l'île de Becian, sur le sommet duquel on croit voir assise la mère de  Dieu (Bogoraditza). Grohmann, dans ses Aberglauben ans Bohmen, nous  parle d'une jeune bergère qui filait dans un bois de Bouleaux, à laquelle  se présenta la Femme  sauvage habillée  de blanc, avec une couronne de fleurs sur la tête ; la Femme sauvage engagea la jeune  fille à la danse, et la fit danser, pendant trois jours jusqu'au  coucher du soleil, mais si légèrement, que l'herbe sous ses  pieds ne se foulait, ne se courbait point. À la fin de la danse, toute la  laine était filée, et la Femme sauvage satisfaitee remplit les poches de la petite bergère avec  des feuilles de Bouleau qui se changèrent de suite en monnaie d'or. On ajoute que, si la Femme sauvage, au lieu  de danser avec une jeune bergère, avait  dansé avec un petit berger, elle l'aurait fait danser ou chatouillé jusqu'à la mort. Le professeur Mannhardt  nous apprend les procédés employés par les paysans russes pour faire  sortir le Liesehi ou génie de la forêt. On coupe, dit-il, des Bouleaux  tout jeunes, on les dispose en cercle, de  manière que les pointes soient  tournées vers le milieu ; on entre dans le cercle, et on évoque l'esprit qui paraît de suite. On se  place aussi sur une souche d'arbre  coupé, le visage tourné vers l'Orient. On  baisse la tête et, en regardant entre les jambes, on dit : « Oncle Lieschi, montre-toi, non pas comme un loup  gris, non pas comme du feu ardent, mais semblable à moi. » Alors les feuilles du tremble se mettent en mouvement et le  Lieschi se montre sous une forme  humaine, et tout disposé à rendre n'importe  quel service à celui qui l'a évoqué, pourvu qu'il lui promette son âme. Il est donc évident, d'après  la conclusion du professeur Mannhardt lui-même, qu'en Russie, l'on suppose la  présence du Lieschi, c'est-à-dire du diable des forêts, non pas seulement dans les souches des arbres, mais aussi  sur les cimes des Bouleaux. Il paraît  qu'au moyen-âge, en France, on conservait les branches de Bouleau comme  un objet sacré. Du Cange cite le procès pour la béatification de Pierre de Luxembourg, où il est dit : « Vidit in quodam coffro  secreto quasdam  virgas de arbore  quadam vulgariter vocata boulo. » Dans un document de l'année 1387, on parle des femmes garnies de verges  de boust. Le Bouleau, pour l'estonien, est la personnification vivante de  sa patrie. On raconte qu'un paysan estonien avait  vu un étranger endormi sous un arbre au moment où un grand orage allait éclater. Il l'éveilla ; l'étranger reconnaissant lui dit : « Lorsque, loin de ton pays, tu éprouveras le mal du pays, tu verras un Bouleau  tortu. Frappe  et demande-lui : Le tortu est-il chez lui ? » Un  jour, le paysan étant parti comme soldat pour la Finlande, se trouva fort  triste, parce qu'il songeait à sa maison  abandonnée et à ses enfants : il vit  alors le Bouleau tortu, il frappa et lui demanda : « Le tortu  est-il  chez lui ? » Alors parut l'étranger, qui fit appeler le plus rapide de ses  esprits, et lui ordonna de transporter le soldat dans son pays avec un sac  rempli d'argent.       Dans le mythe, le Bouleau  (consacré au dieu Thunar) représente, comme le coucou (l'oiseau de Thunar, d'lndra et de  Zeus), le retour du  printemps. Ce Bouleau vert, ce printemps, qui  réapparaît au guerrier estonien après l'hiver, après la saison de guerre, ce  Bouleau qui nous fait retrouver notre chère patrie est, en même temps, un appel à cette  vie joyeuse de  la nature, de laquelle le dur hiver nous avait exilés. (Pour les légendes  germaniques qui concernent le Bouleau, cf. Mannhardt, Germanische Mythen et Baumkultus der Germanen.) Dans la haute Bretagne, d'après ce que M. Sédillot  vient de  m'apprendre,  quand un enfant est faible, on prend des feuilles de Bouleau, on les met chauffer dans un  four, et, quand elles sont desséchées, on les place dans le berceau de l'enfant pour lui donner de la force ». (Angelo  de Gubernatis. — La  Mythologie des plantes ou les légendes du règne végétal, Paris, 1882). d'après le Dictionnaire archéologique et explicatif de la
science du blasonComte Alphonse O'Kelly de Galway — Bergerac, 1901
 
         |